Le petit Guévard est né un beau matin d'août 1952. La sage-femme lui tendit le biberon, d'un geste sûr, il ouvrit les bras, les coudes bien écartés, et … fit tomber l'objet. Son sort était scellé, il jouerait 2e ligne. La sage-femme, nullement découragée, lui tendit une pipe ; il la bourra… sa pochette sous le bras et les lunettes sur le bout du nez. Le sort, repassa une couche : quand il serait grand, il ferait Eddy Barclay dans la vie. Tonton déploya au RCV une activité inversement proportionnelle à sa vie hormonale.

Sa disparition, une saison durant, n'était une surprise pour personne. On savait qu'elle était synonyme d'amour, voire de mariage… Et puis, nous ne faisions même plus mine de nous étonner lorsqu'il se retrouvait, quelques mois plus tard, sans crier gare, derrière le bar du club-house comme si de rien n'était. Malgré cette vie sentimentale turgescente, Tonton a sans doute totalisé plus de 20 licences au RCV, une espèce de record.

L'homme, de + 190 cm, savait y faire pour arracher les ballons pourtant douillettement nichés dans les bras des packs adverses. Gros coureur, les regroupements étaient pourtant sa cour de récréation. On se souvient de deux blessures : une fracture du rocher, œuvre de l'école Saint-poloise, qui lui laissa comme un goût de fumier dans la bouche et une fracture du bras, presque anodine, qui je crois, l'éloigna à jamais des terrains.

De 15 ans bien sonnés notre aîné, sa maison était toujours ouverte, à nous et à nos 20 ans ; sa calvitie et sa barbe rassuraient les mamans, amadouaient les souris…. Une fois, une seule, en octobre-novembre 1984, l'alcool eut raison de lui et le vide-poches de Jean s'en souvient encore. C'était le jour du mariage d'un autre zizi lover du club dont on reparlera dans un autre portrait. Le lendemain, Roland piqua la plus belle gueulante de son énorme carrière d'entraîneur, la noce avait fait long feu et les convives avaient troqué la cravate contre les shorts. Ce jour-là, Calais nous a passé une déculottée 11-00 (affront vite lavé 8 jours plus tard lors du second tour de la Coupe de France). Tonton a joué ce match, livide, sans un bruit, les dents sans doute encore serrées sur sa pipe… Toutes les autres fois il a su nous empêcher d'aller trop loin… Juste avant que les bornes ne soient passées… Souvent à un poil prés… Aujourd'hui, il a installé son usine à bébés pas loin de Saint-Amand, à Maulde histoire de se poser définitivement… A moins que ?